Billet du 29 septembre 2025 : emportez-moi
- livchine
- il y a 2 jours
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Un jour nous nous reposerons ce sont les derniers mots de l’Oncle Vania.
La littérature c’est ça, ça t’aide à vivre et à mourir.
Je rentre dans une nouvelle phase de vie, celle du ralentissement, celle de l’atterrissage.
Jadis je disais : je veux une montagne par jour à gravir, je veux des obstacles, des difficultés, de l’adversité.
Toute panne de voiture était une joie pour moi,
Je me nourrissais d’imprévu, je cultivais la serendipity ,
Je voulais me perdre, je voulais frôler le ratage.
J’aimais narguer la bien- pensance, j’aimais ressentir, je me moquais de la mort.
J’aurai bien voulu suivre la piste de Mozart, Rimbaud, Tchekhov, mourir à 35 ans, et ne jamais connaître le continent vieillesse.
Raté, les 83 ans arrivent. Je n’ai qu’un mot à la bouche : je n’en peux plus, l’hormonothérapie m’épuise, les escaliers sont une torture, je rêve de ne rien faire. Je regarde avec nostalgie mon fils qui court dix huit kilomètres par jour, ma fille qui retape une ruine en Lozère qui parcourt l’Asie dans tous les sens qui se passionne pour la transhumance à l’ancienne .
Moi ? Je marche lentement, je perds de la force, je n’ai plus d’énergie, je suis criblé de rides, des tâches sur le visage, de la calvitie, des dents en moins.
Alors j’apprends la pratique de la chaise longue, je scrolle Facebook, je perds mon temps, je vis au ralenti, je lis Emmanuel Carrère, le Monde, Libé.
Tout s’agite autour de moi et j’apprends l’immobilisme, le rien
faire.
J’ai déclaré que ma vie avait commencé avec Rimbaud, je l’ai terminé avec Rimbaud en Éthiopie.
Ma seule activité : je fréquente assidument l’hôpital, six pilules chaque matin pour détruire ma testostérone, accélérateur de cancer, opération chirurgicale dite plyopastie pour gérer les écoulements .
Emportez- moi dans une caravelle, dans une vieille et douce caravelle, dans l’étrave si l’on veut ou dans l’écume et perdez moi au loin au loin Henri Michaux
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