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Billet du 3 mars 2024. Dès que je vais bien, je vais mal


Conférence de presse de Capitale Française de la Culture. Hervée de Lafond, commissaire.


Dès que je vais bien, je vais mal, c’est délirant et c’est épuisant


Je vais bien, ma vie se termine bientôt.

Je vais mal, je ne sais pas quand.


Je vais bien, il y a de l’eau chaude à la maison, parce que j’ai une maison.

Je vais mal parce que j’ai vu des corps allongés dans le métro : ceux qui n’ont pas de maison.


Je vais bien, j’ai déjeuné avec mes enfants et mes petits enfants.

Je vais mal car j’ai mangé trop de dessert sucré.


Je vais bien parce que je suis allé à Harar en Ethiopie dire du Rimbaud aux pierres.

Je vais mal parce que je ne sais pas comment aller plus loin.


Je vais bien j’apprends des poésies par coeur, cela m’arrache à la médiocrité quotidienne.

Je vais mal parce que cela prend du temps la mémorisation.


Je vais bien car j’ai une petite  chienne qui s’appelle Titania.

Je vais mal car elle m’a bouffé la ceinture de sécurité de la voiture et que je n’ai pas réussi le contrôle technique.


Je vais bien car j’ai acheté des courgettes à 0,79 cts le kilo.

Je vais mal car j’aime trop les petits agneaux et leur viande.


Je vais bien car le volcan du désir s’est apaisé avec l’âge.

Je vais mal car j’aurais voulu plus en profiter encore et que parfois il m’envoie encore des pulsations.


Je vais bien parce que je ne suis pas le seul à penser ce que je pense dans la diaspora juive.

Je vais mal quand j’entends des juifs se réjouir des 30 000 morts de Gaza.


Je vais bien car j’ai vu le film la zone d’intérêt.

Je vais mal quand j’entends les critiques du masque et la plume vanter Daaaali.


Je vais bien quand la balance affiche 87 kgs.

Je vais mal quand la balance affiche 90 kgs.


Je vais bien parce que ma complice depuis 52 ans, Hervée  a été appelée aux commandes de Capitale Française de la Culture.

Je vais mal quand j’entends parler des imbroglios de l’organisation.


Je vais bien car j’ai un poêle à bois qui ronronne.

Je vais mal car Willy ne vient pas ramoner et que je risque un feu de cheminée.


Je vais bien car l’Alsheimer de ma femme progresse très lentement.

Je vais mal car elle confond les 4 poubelles.


Je vais bien car tous les jours je prépare les déjeuners pour les résidents du théâtre de l’Unité.

Je vais mal quand il y a des restes que je ne veux pas jeter.


Je vais bien car nos kapouchniks affichent complet depuis 20 ans,

je vais mal car le public est acquis d’avance.


Je vais bien car j’ai écrit la légende du théâtre de l’Unité,

je vais mal car cela n’intéresse que moi.


Je vais bien quand l’armée ukrainienne résiste.

Je vais mal quand j’apprends qu’il y a eu 44 000 amputations qui peut- être n’auront servi à rien.


Je vais bien quand je vois tous les enfants de nos comédiens qui grandissent,

je vais mal quand j’ai deux enterrements dans la même semaine


Je vais bien quand je marche dans la forêt,

je vais mal quand je vois les dégâts du scolite sur les arbres


Je vais bien quand je vois que les migrants syriens que nous avons accueillis ont appris le français,

je vais mal quand je pense aux noyés de la Méditerranée


Je vais bien quand les nappes phréatiques se remplissent.

Je vais mal quand il se met à trop pleuvoir.


Je vais bien car mon cancer ne me fait pas souffrir,

je vais mal quand je vois qu'il progresse en silence.


Je vais mal quand on fait du mal à des juifs

et quand les juifs font du mal à d’autres.

Et là je vais toujours mal.



































































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