Billet du 8 juillet La Comédie Française et l'Unité
- livchine
- il y a 3 jours
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J’écoutais attentivement sur France Culture l’administrateur de la Comédie Française s’exprimer sur son bilan.
Eric Ruf a vraiment toutes les qualités, il est metteur en scène et scénographe, il est cultivé, il a obtenu un remplissage de 98%.
Il obtient sans arrêt d’excellentes critiques, il est agréable et modeste.
Pour tout le monde, il est le modèle, il s’exprime bien, il respire l’honnêteté, il quitte la Maison après 11 ans, deux mandats de cinq ans
Il va connaitre un immense succès avec le soulier de Satin à Avignon. 38 ans après Vitez
Entrer à la Comédie Française est le rêve de tous les comédiens, et puis la meilleure image de marque qui puisse exister.
La Comédie Française, c’est 400 employés, une troupe permanente. 24 millions de subventions.
J’y vais de temps en temps mais c’est un immense fossé qui me sépare de ses réalisations et pourtant c’est du théâtre bien ficelé, avec des comédiens solides, mais quand je dis que pour rien au monde je n’aurais eu envie de faire une mise en scène pour cet excellent théâtre on croit que je mens.
Oui ce n’est pas mon style de théâtre. Du tout du tout.
La Maison de Molière ? Molière était tout sauf consensuel, ses pièces s’attaquaient à tous les faussaires, à la noblesse et étaient souvent passibles d’interdiction.
La Comédie Française ne dérange jamais, pas de surprise on va voir ce qu’on attend d’elle, même s’il y a deux petites salles annexes soit disant un peu plus expérimentales.
Je demandais un jour à la bibliothécaire du Français, ce serait qui Molière pour vous aujourd’hui ? elle me répondit sans ambage, un style Coluche ou les guignols de l’Info.
Alors évidemment, je prends conscience de tout ce qui me sépare de l’excellent Ruf.
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Moi j’aime l’Art furtif , inattendu qui jaillit partout où on ne l’attend pas, j’aime jouer pour des publics empêchés qui n’auraient jamais eu l’idée d’aller au théâtre, j’aime chambouler les classiques, j’aime les quatrièmes mi- temps, jouer hors les murs, j’aime l’ébouriffé le désordre, le théâtre gratuit, les actes poétiques radicaux, j’aime réveiller le monde des morts, la célébrité et la carrière ne m‘intéressent pas.
Je veux aller là où il y a du désert, je veux défier toutes les lois, j’ai aimé jouer pour deux personnes et 40 000 personnes, j’ai décrété que l’art était une arme de construction massive, j’ai aimé Rimbaud , je suis allé à Harar, j’ai voulu retrouver les racines du théâtre, Dionysos, les fêtes bacchiques, j’ai aimé remuer une ville toute entière.
Ma mère me reprochait souvent de ne pas faire du vrai théâtre, et pourquoi ce ne serait pas moi le vrai théâtre et la Comédie Française un théâtre frelaté ? Je pose la question.
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