Billet du 18 juillet 2025. Le livre est enfin arrivé
- livchine
- 20 juil.
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Le livre est enfin arrivé, cela ressemblait à une naissance, or en caressant son beau papier, et sa couverture rouge, j’ai été pris d’une violente mélancolie.
Ce n’était plus mon livre, il était un objet extérieur, étranger et définitif, je ne pouvais plus rien rajouter, ni corriger.
Je soupesais ses 209 grammes, un condensé de toute notre vie théâtrale.
L’éditeur ne voulait pas que je sorte toutes mes citations fétiches. il fallait que cela soit personnel, il est vrai souvent j’abuse, j’aime me cacher derrière des citations.
Dans cent ans ou deux cents ans, les hommes qui vivront après nous et pour qui nous frayons le chemin, auront- ils une pensée pour nous ? Mais non, ils nous auront oublié.
Tchekhov
Je n’ai jamais eu l’intention d’écrire un livre, je voulais venir à bout d’un soupçon.
Bien-sûr nous aurions pu faire une liste, nous avons monté 3 Molières, un Shakespeare, un Tchekhov, mais notre différence avec Chéreau ou Ariane Mnouchkine, c’étaient nos opérations festives territoriales et des centaines d’interventions, j’ai essayé d’en faire un catalogue et là je décryptais notre personnalité unique, ce qu’on appelait : le théâtre de l’Unité c’est toujours autre chose.
Alors j’ai mis à cinq ans à rassembler et à me souvenir de tout ce que nous avions commis. Pas des anecdotes, là il eut fallu 450 pages, pas de photos non plus, ça tout le monde fait : des albums -souvenirs. Juste les faits, et expliquer que je voulais m’arrêter à un moment précis. Rimbaud à Harar, c’était un symbole très fort, même si je me persuadais peut être à tort que j’avais réinventé la naissance du théâtre.
J’avais dans la tête que ce serait un livre publié en un seul exemplaire, que je serais allé déposer à la bibliothèque de l’institut d’études théâtrales de la Sorbonne à Censier, là où j’avais découvert le théâtre. Je voulais qu’il soit à la disposition des étudiants, qu’ils puissent se dire comme moi dans le passé, ah ça ça a été fait, parce que nous notre fierté quand on faisait notre 2CV théâtre, c’est que l’on pouvait aller chercher dans toute l’histoire du théâtre, ça n’avait jamais été fait.
On m’a expliqué qu’imprimer un livre en un seul exemplaire ça allait être aussi cher qu’en deux, dix ou vingt exemplaires. Je n’avais pas envie d’ouvrir un commerce de livres, parce que j’allais me prendre au jeu de qui-n’a- pas -acheté -le- livre, j’allais retomber dans le marketing et le merchandising que je suis incapable de faire.
Et voilà comment le 18 juillet 2025, je me suis retrouvé devant dix cartons de 50 livres que je ne peux même pas offrir, car cela mettrait nos successeurs devant un trou de 3250 €. Pourtant cela serait mon rêve d’offrir ces mille et une plaisanteries aux mille et un artistes qui nous ont accompagné pendant un demi- siècle.