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Billet du 7 avril 2025 : Ecrire aux morts

  • Photo du rédacteur: livchine
    livchine
  • 7 avr.
  • 2 min de lecture







En fait j’aime écrire aux morts.

Mon père, il ne s’intéressait qu’ à ma réussite sociale, je ne suis pas devenu ingénieur, pas médecin, pour lui je n’étais qu’un raté. Parfois je dialogue avec lui, mort il y a plus de 40 ans. Je lui explique la révolution internet, le GPS, le portable. Je lui parle d’Israël, mon point de rupture avec lui. La haine des arabes. Papa, tu as perdu ta mère et ta soeur dans un camp, tu ne peux pas avoir la haine, tu n’as pas le droit. Je lui raconte que nous sommes allés voir en 2017 sa maison d’Odessa.

Ma mère parlait quatre langues, elle avait vécu un peu en Russie, puis en Allemagne puis en France et en Angleterre. Dès l’âge de dix ans elle  me trainait salle Pleyel ou au théâtre des Champs Elysées aux concerts de Rubinstein, de Richter, de Menuhin, d’Oistraikh. Une prof de piano russe trouvait que j’avais des aptitudes. Je n’ai qu’un souvenir d’ennui profond. Et puis elle allait tout voir ce qu’il fallait voir, elle dormait au théâtre, mais c’était une question de standing. Raïssa, qu’as tu vu de beau cette semaine ? Quand j’ai commencé le théâtre, elle remplissait pour moi son fils le théâtre des 3 baudets avec toutes les immigrées russes de Paris. A sa mort elle avait laissé une chemise intitulée “Jacques” remplie de tous les programmes de toutes les pièces que j’avais jouées, et aussi une centaine de lettres que je lui avais écrites.

Je continue de lui écrire, tous ces billets c’est sûr que c’est pour elle.

Et puis elle m’avait transmis la recette de la Vatrouchka, un gâteau russe au fromage blanc, je l’ai gardée précieusement et régulièrement je le fais ce gâteau et je sais qu’elle me voit.

J’écris aux enfants : jetez tout, mais ne gardez qu’une seule relique, le volume du transsibérien de Blaise Cendrars  dans une édition originale offert par ma mère pour mes 20 ans.







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